Chacun reste libre de son vote
Jusqu'à là, chacun savait plus ou moins s'il était de droite ou de gauche ; pour une réforme progressive des choses ou une révolution, pour ou contre le capitalisme, inquiet ou non pour la survie de la planète. Mais le vrai et le faux en politique se mélange, la démocratie passe pour de la manipulation en même temps que les gouvernements autoritaires passent pour des grand protecteurs de l'identité, mais au mépris des libertés.
Prendre, ou aspirer prendre des responsablités politiques, apparaît comme suspect, destinés seulement aux ambitieux et aux menteurs, plus amoureux du pouvoir et de leur propres personnes que soucieux de l'intérêt commun et motivés par l'altruisme. Nous sommes entrés dans l'ère du soupçon, l'heure où le pouvoir contre le Pouvoir se prendrait par la rue. C'est comme si on ne savait plus distinguer dictature, démocratie et anarchie.
Ce qu'on réfute actuellement dans la démocratie, c'est sa tentation oligarchique, celle d'être gouverné en fait par un tout petit nombre. Cette dérive existe dans bien des régimes, qu'ils soient capitalistes ou communistes par exemple. Dans l'utopie de la désignation par tirage au sort plus que par élections, qui ne passent plus quasiment que pour le bal des ambitieux, c'est l'espoir d'être vraiment représenté par "des gens comme nous", reflet de la diversité de la population, qui est à l’œuvre.
Bien souvent, hors de villages où "tout le monde se connaît", c'est ce qu'on arrive pas bien à distinguer dans les listes qui se présentent à nos suffrages : qui pensera la ville en n'oubliant pas que moi, j'existe dans cette ville ? Chacun s'oriente comme il peut, tantôt en recherchant les visages connus et de confiance, tantôt se fiant à la qualité de la communication de chaque liste, ou en se disant que la ville a été soit bien, soit mal gérée de son point de vue et que cela suffit à renouveler ou retirer sa confiance à la municipalité en place.
Chacun reste libre de son vote, choisissant si et à qui il le donne, en cela déjà, la démocratie est remarquable. Je ne demande à chacun que ce soit "en âme et en conscience" et pas seulement sous la foi de la colère et du soupçon, qu'il choisisse ce qu'il fait de son droit de vote.
(L'article mis en partage ci dessous a été écrit en 2017, avant les présidentielles. En 2020, pour les municipales, le climat n'est pas moins tendu, la grogne encore plus loin d'être apaisé et les identités politiques encore plus incertaines et mouvantes.)
J’imagine que personne n’ira aux urnes la fleur au fusil, en sifflotant avec insouciance, comme si tout allait tout bien. Nous sommes par trop échaudés par des années et des années de présidences, de gouvernements et de majorités successives pour être sans vigilance devant ceux que nous choisirons. Beaucoup d’ailleurs iront voter avec la rage au ventre, prêts à envoyer baladés tous les caciques du système, ou bien frustrés de voir ce que devient le monde, la France, la politique ; en colère peut-être contre ces politiciens de tous bords qui se succèdent sans offrir de meilleures vies à leurs concitoyens.
Nous avons maintenant tous compris qu’il n’y a qu’un monde, qu’une terre. Nous avons tous vu que dans le moindre de nos gestes quotidiens, dans le plus petits de nos téléphones, sur presque tous les étals de nos magasins, la mondialisation laisse ses traces. C’est que l’interdépendance des peuples et des individus ne peut plus faire de doute. Nous ne saurons plus nous couper du monde. Nous n’avons en fait de choix qu’entre la brutalité, au nom de tel libéralisme ou protectionnisme économique ou politique, et la régulation équilibrée des relations. Nous n’avons en fait pas d’autre nécessité que de réduire les écarts générés par l’incroyable et scandaleuse répartition très inégalitaires des richesses qui rejettent dans la pauvreté et le chômage tant de familles.
Nous n’avons pas à dire pour qui voter ou ne pas voter, ni même s'il faut voter ou non. Nous n'avons qu'à rappeler l'exigence de solidarité qui fonde les communautés, les culture et les civilisations humaines.
La solidarité, c’est que qui fait rechercher un partage du travail qui permettent à tous d’y trouver une place, c’est ce qui fait que la femme et l’homme sont considérer comme égaux en terme de salaire et de carrières, c’est ce qui fait que l’école offre un vrai socle commun d’intelligence et de connaissance, quels que soient le milieu ou l’origine, c’est ce qui fait défendre autant que la richesse du pays le permet, nos concitoyens atteints par la maladie, le handicap, la grande vieillesse ou l’accident grave de la vie, c’est ce qui fait de notre peuple l’ami des autres peuples.
La solidarité, c’est l’autre nom des droits de l’homme dont s’enorgueillit notre pays, la solidarité, c’est l’héritage laïcisé d’une tradition judéo chrétienne qui a su se réformer et renoncer aux diktats du religieux pour permettre le lien entre des hommes et des femmes d’origines et de croyances diverses, c’est l’exigence de justice qui trouve une traduction dans l’organisation politique et économique de notre société, c’est une égale préoccupation du présent et de l’avenir.
Nous ne vous demandons en fait que d’être citoyens, c’est-à-dire acteurs de ce pays qui ne tient que parce que nous organisons notre façon de vivre ensemble de façon démocratique et solidaire. Faites-le par le vote, faites-le par vos engagements militants ou associatifs, faites-le selon vos convictions, faites-le comme vous voulez, mais faites-le.
Photo © Fernando Giuli
https://500px.com/photo/187759173/